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Terrance Green inset, with white flowers. A person holding a leash and a white cane in the background
Toujours prêt à intercéder pour les personnes opprimées, Terry Green (LL.B. 1999) a travaillé avec acharnement en faveur de la justice.

Cet avocat aveugle, défenseur de longue date des personnes handicapées, est devenu l’un des principaux avocats pour les chiens (et leurs propriétaires) – fait peu surprenant quand on sait qu’il recourait lui-même à un chien-guide, notamment durant ses études à Fauteux.

Me Green s’est éteint plus tôt cette année, à l’âge de 74 ans.

« Terry et moi avons fait connaissance en classe. Comme nous avions tous les deux des handicaps, nous sommes vite devenus amis », se rappelle le professeur Ravi Malhotra, un expert du droit des personnes handicapées.

Professor Ravi Malhotra

« Il avait des convictions profondes et des opinions tranchées. Â»

Ravi Malhotra

— Professeur titulaire

Il a travaillé avec des gens de tous horizons politiques, ce qui est de plus en plus rare, et s’intéressait tout particulièrement aux questions touchant les anciennes et anciens combattants. Il était passionné et intransigeant. Très tôt dans sa carrière, il s’est mis à exercer seul – une voie libératrice, qui lui simplifiait la tâche en raison de son handicap, mais à la fois très difficile. »

En 1992, Terry Green a reçu la Médaille du 125e anniversaire de la Confédération du Canada du Gouverneur général du Canada en reconnaissance de ses contributions en faveur d’une plus grande égalité au pays.

En octobre 2008, il a fait l’objet d’un article intitulé « Champion of the Underdog », paru dans Lawyers Weekly, où on y décrit toute sa vigueur lorsqu’il représente des animaux et leurs propriétaires, qui sont touchés par les lois visant certaines races de chiens.

Il est devenu aveugle à l'adolescence lorsqu'il a développé le syndrome de Stickler, une maladie du tissu conjonctif qui provoque un décollement de la rétine.

En 1978, il a obtenu un baccalauréat en arts spécialisé en psychologie et en sociologie à l'Université St. Mary's, puis, en 1992, une maîtrise en administration publique à l'Université de Winnipeg. 

Tout au long de sa carrière, il a travaillé avec des groupes de défense des droits et à titre individuel pour améliorer et protéger les droits des personnes handicapées. Il a commencé en Nouvelle-Écosse avec le « Blind Rights Action Movement » et le Conseil canadien des aveugles, ainsi qu'un journal intitulé « Touchstone », qui dénonçait et éliminait les obstacles. Au cours d'un passage à Transports Canada, il a reçu un prix d'excellence pour son travail en matière d'équité dans la planification des ressources humaines.

Il a été impliqué pendant des décennies dans la principale organisation canadienne représentant les personnes handicapées, aujourd'hui appelée Conseil des Canadiens avec déficiences (à l'origine COPOH), et remonte à ses débuts à Winnipeg au milieu des années 1970.

Dans l’article, on mentionne aussi que l’avocat a fait carrière dans quatre domaines avant d’aller faire son droit, à l’âge de 45 ans.

Il a obtenu son diplôme en droit (LL.B.) en 1999 et a été admis au Barreau en 2001.

En se confiant sur les obstacles rencontrés au début de ses études, il rapporte « avoir passé de justesse » sa première année, et ce, grâce à des bénévoles qui lui faisaient la lecture et à Quicklaw – un système de base de données contenant de la jurisprudence et des lois –, dont il lisait le contenu à l’aide d’un ordinateur doté d’un synthétiseur vocal. « Il fallait que je consulte un dossier au complet dans Quicklaw pour trouver ce que je cherchais », raconte-t-il dans l’article.

« En 1996, j’ai discuté avec des membres du corps professoral de l’Université d’Ottawa, et nous avons conclu que j’aurais accès au matériel de cours en format électronique. Avec l’aide de mes camarades de classe, nous avons lancé le Système de bibliothèque et de renseignements en ligne (OLLIS) pour les personnes ayant des difficultés de lecture des textes imprimés. »

Ses camarades et lui ont conclu un accord avec les éditeurs. Ces derniers fournissaient le texte sous forme électronique, puis le groupe (avec un coup de main de spécialistes en informatique) convertissait le tout en format HTML et publiait les livres, chapitre par chapitre, sur un site Web privé.

« Ce projet m’a permis de lire les documents requis. C’est comme ça, et avec l’aide de mes amis, que j’ai réussi à faire mes études de droit », explique-t-il.

Après avoir obtenu son diplôme, Me Green a envoyé des centaines de CV, sans succès. Il avait pourtant réponse à toutes les questions qu’on lui posait. On lui demandait comment il parviendrait à trouver la salle d’audience (« J’ai mon chien-guide et je vais demander à quelqu’un dans le hall », répondait-il) ou comment il ferait pour gérer des documents de dernière minute (« J’ai un assistant et j’utilise un ordinateur avec un synthétiseur vocal et, bien sûr, j’ai toutes mes notes avec moi »). Malgré tout, il n’a jamais dépassé le stade de la deuxième entrevue.

« J’ai donc lancé mon propre cabinet », poursuit-il.

Il avait ce que ça prenait. Comme il adorait les animaux, défendre les droits des animaux était un choix évident. « J’ai toujours été entouré de chiens, confie-t-il au Lawyers Weekly. Ma famille élevait des bergers allemands, et j’ai rencontré ma femme lors d’une exposition canine. »

Me Green a d’abord représenté les personnes ayant recours à un chien-guide.

statue of lady justice, holding the leash of a guide dog
The logo Terry Green's firm used to promote dog-related events.

Puis, en 2005, sa clientèle s’est élargie pour inclure bon nombre de propriétaires de pitbulls – et de bien d’autres chiens ressemblant plus ou moins à cette race – lorsque le projet de loi 132 (la loi interdisant certaines races) a été présenté en Ontario. À cette époque, il s’occupait déjà de litiges canins, liés notamment aux règlements sur le contrôle des animaux, et il a représenté une personne dans la première affaire sur les races interdites.

Green a déclaré que les services de contrôle des animaux avaient saisi deux Staffordshire bull terriers qui auraient mordu un jeune alors qu'il jouait au ballon dans un parc. Les chiens devaient initialement être euthanasiés. Green a réussi à en faire libérer un, mais le ministère public a décidé de porter l'affaire devant les tribunaux.

« Le témoin clé ne s'est pas présenté et l'affaire a été classée sans suite », explique Green. « À ce moment-là, nous discutions pour savoir si la morsure avait été provoquée ou non, et non pas si les chiens appartenaient à une race interdite. C'est ainsi qu'a débuté ma carrière dans le domaine du droit canin. »

Me Green était vraiment un grand défenseur des personnes marginalisées, la majeure partie de sa clientèle en Ontario recevant du soutien pour personnes handicapées.

« Ces gens obtiennent généralement un chiot sans en connaître l’ascendance, précise-t-il dans l’article, et peu d’entre eux ont les moyens de passer par des procédures judiciaires. »

Il a dit avoir perdu le compte du nombre de chiens qu’il a sauvés.

« Les murs de notre salle de conférence sont entièrement recouverts de photos de chiens venant de partout en Ontario. »

Son cabinet a même publié You, Your Dog, and the Law: Protecting Yourself, And Your Dog!, un guide destiné aux propriétaires de chiens à Ottawa.

En 2013, il a représenté un ancien combattant du Manitoba qui s'était vu refuser l'accès à un établissement local parce qu'il devait être accompagné d'un chien d'assistance. Le succès remporté par M. Green dans cette affaire a conduit à une modification du Code des droits de la personne du Manitoba, qui reconnaît désormais expressément que les « animaux d'assistance » relèvent du champ d'application du Code.

Green, qui dépendait des autobus urbains d'Ottawa pour se déplacer avec son chien-guide et sa femme, également aveugle, était également bien connu pour aider les aveugles à utiliser les transports en commun OC Transpo.

En 2007, il a obtenu une décision de l'Office des transports du Canada (OTC) concluant qu’un obstacle injustifié se présente pour les personnes ayant une déficience visuelle lorsque les chauffeurs d’autobus n’annoncent pas les arrêts, comme l'exige la politique d'OC Transpo.

En conséquence, OC Transpo a installé en 2010 un système d'annonce des arrêts d'une valeur de 12 millions de dollars, mais l’OTC a ensuite infligé une amende de $ 25,000 dollars à la société d’autobus après que les agents d’application des lois ont découvert que les arrêts importants n'étaient pas annoncés lors de trois trajets.

Il a également intenté une action contre la ville d'Ottawa concernant l'absence d'aménagements pour les personnes handicapées lors des élections municipales de 1994. À la suite de cela, la ville a fourni des modèles.

L’avocate ottavienne Anne Vespry a rencontré Terry Green lorsqu’il a fondé OLLIS. Elle y a travaillé avec lui jusqu’à ce qu’elle décroche un emploi surprise au Barreau… et qu’ils se rendent compte – la première journée de cours pour l’admission au Barreau – qu’il n’y avait pas de matériel adapté pour les examens. Elle a alors converti le matériel imprimé en un format lisible pour lui.

Anne Vespry

« Terry est devenu mon directeur de stage, puis mon partenaire d’affaires. C’était souvent fascinant de le voir surpasser les attentes et faire tomber les préjugés des gens dans la profession et au... Â»

Anne Vespry

— Avocate et notaire

Yavar Hameed, un avocat d’Ottawa, a dit de son camarade de classe et ami de longue date qu’il a été l’un des premiers avocats à lui montrer comment les obstacles dans la salle d’audience pouvaient être surmontés.

« Lorsque j’ai commencé à exercer seul, je retenais souvent mon souffle et je me mettais à bégayer quand je franchissais la barre pour prendre place à la table des avocats, explique-t-il.

Yavar Hameed

« Quand je croisais Terry à la cour des infractions provinciales avec son chien d’assistance, j’étais émerveillé par la facilité avec laquelle il se débrouillait. Il était si déterminé et à l’aise dans... Â»

Yavar Hameed

— Avocat

En tant que personne racisée qui avait souvent l’impression d’attirer tous les regards dans une salle d’audience, j’admirais Terry pour son courage et sa volonté d’amener son plaidoyer sans complexe là où ça comptait et au service des personnes marginalisées. Cette leçon m’inspire encore aujourd’hui. Lorsque je suis confronté à un défi juridique, je me demande : que ferait Terry? »